JOURNAL is a process diary, monthly digest of choreographic work as well as containing reflections, dialogs, notes and contemplations. It subscribes itself to diverse formats and forms, changing as it goes along, and shaping itself out of the requirements of the moment at hand.
Appropriation dansée du corps et de l’espace

Deux pièces récentes de Marjana Krajač interrogent les (im)possibilités de s’approprier son propre corps (Courte fantaisie sur le établissement de la propriété du corps) ainsi que les espaces publics dans lesquels nous travaillons et créons (Mode d’emploi pour les espaces vides). L’auteure questionne ces problèmes en se positionnant et en agissant en tant qu’artiste chorégraphique, socialement et politiquement engagée. Marjana Krajač, actuellement l’une des chorégraphes croates les plus intéressantes, s’efforce d’ “établir un autre type de transfert entre les personnes, une autre sorte d’hypothèse humaniste, en créant un autre champ de partage que celui inscrit de manière répressive dans le monde qui nous entoure”1. Dans ces deux spectacles, elle s’engage, en collaboration avec le dramaturge Marko Kostanić, dans un travail exigeant pour les auteurs, les interprètes et les spectateurs, en posant des questions profondément déterminantes pour la vie de chacun, que ce soit depuis la scène, la salle, ou en dehors du théâtre : Suis-je capable de reconnaître les propriétaires et les dirigeants de mon corps et de l’espace qui m’entoure? Suis-je capable de m’engager afin de “neutraliser” leur pouvoir et d’engendrer mon propre " contrepouvoir " spatio-corporel?

À qui appartient le corps de Marjana Krajač?

Dans son solo d’une durée de vingt-cinq minutes intitulé Courte fantaisie sur le rétablissement de la propriété du corps2, Marjana Krajač livre une interrogation gestuelle sur les potentialités de propriété (au moins temporaire) de son propre corps. En mettant l’accent sur le problème de l’appartenance sociale du corps déterminant fortement une autre forme de possession du corps  celle individuelle, personnelle, intime, donc, essentielle  Marjana Krajač essaie, par un subtil travail de danse, de libérer au maximum son propre corps des inscriptions du monde extérieur.
Le décor du spectacle, composé d’une photo en couleur, immense, accrochée en fond de scène, représente un groupe de manifestants et des policiers casqués dans une rue zagréboise en plein jour. Cette photo a été prise lors d’une manifestation de protestation contre la construction d’un centre commercial dans le centre historique de la capitale croate. La chorégraphe/danseuse, Marjana Krajač, qui se situe entre ce document photographique figé sur scène et les attentes vives des spectateurs, est à la fois le sujet et l’objet ou pour reprendre les mots de Laurence Louppe, " à la fois producteur et lecteur de sa propre matière3 ". Se trouvant, d’un coté, sous les regards anxieux des manifestants et les regards froids des policiers sur la photo, et de l’autre, sous les regards du public caché dans le noir de la salle de théâtre, elle oscille entre diverses postures. Elle hésite entre le geste de la jambe et celui de la main, pour finalement exécuter un petit saut. Elle produit à un moment donné des gestes plutôt lisibles et clairement inscrits dans l’espace, mais rarement frontaux. Puis ses gestes se métamorphosent peu à peu en mouvements dansés, non strictement définis et laissant des incertitudes quant à leurs dessins et leurs découpes. Sans changements significatifs d’effort et d’énergie, sans grande amplitude de mouvement, sa danse ne fait pas montre de virtuosité technique, mais de temps en temps la danseuse invente des mouvements exigeants (un saut vers le sol, les genoux ouverts en dehors, par exemple) donnant à voir ses habiletés motrices. Marjana Krajač s’est formée à l’École de danse contemporaine " Ana Maletić " à Zagreb, une école fondée sur les principes éducatifs de Rudolf Laban, puis à l’Académie des arts performatifs, à Berlin. Elle n’a ni technique corporelle rigoureuse ni allure athlétique mais son corps est stable centré, souple, malléable et sa sensibilité proprioceptive bien développée.

Sans vouloir tisser une chorégraphie très structurée, Marjana Krajač exécute sa petite danse réflexive en essayant de se réapproprier son corps ne serait-ce que pour un temps, celui de la représentation, et dans un espace limité, celui de la scène de théâtre. Au cours du spectacle, une bande sonore enregistrée durant la manifestation de protestation soutient parfois discrètement la valeur documentaire du décor. La chorégraphe/ danseuse ne répond pas gestuellement à cet univers sonore mais suit sa musicalité intérieure et se déplace à son propre rythme, pour l’essentiel irrégulier et imprévisible. Tout au long du spectacle, elle est vêtue d’une courte jupe bleu cobalt, d’un tee-shirt rouge vif et de chaussettes grises. On pourrait dire que Marjana Krajač danse comme une jeune fille rangée, très sérieuse et cultivée, qui sent la nécessité de questionner impérativement tous les apprentissages qu’elle a précédemment recus en danse et toutes les règles édictées par le monde extérieur et imposées à son corps. Elle est entièrement plongée dans un travail d’invention de mouvements qui lui appartiendraient en propre. Une tâche impossible? Dans un livret qui accompagne le spectacle Marjana Krajač écrit: Mon corps ne m’appartient pas. Je l’utilise, je percois le monde à travers lui. Si je n’étais pas incarnée, il me serait impossible de lire le monde qui m’entourece dernier ressemblerait alors à une masse amorphe et indéfinissable. Mon corps est donc un préalable nécessaire à la définition du monde. Cependant, aussi essentiel que puisse être mon corps pour ma propre existence – il ne m’appartient pas. Il est contraint par des protocoles, une architecture, des structures spatiales, les autres corps, l’éducation, l’apprentissage de la danse, la survie physique, la survie économique, la survie émotionnelle, la douleur ; et de temps en temps, il se contraint lui-même. Si je n’en suis pas le propriétaire, cela veut dire que je le partage avec d’autres instances, que d’autres instances réclament et exercent le droit de l’utiliser, de le diriger, de le contrôler et de le structurer dans le domaine de la responsabilité. La présente fantaisie réfléchit sur l’idée selon laquelle la pratique chorégraphique serait un lieu possible de rétablissement de la propriété du corps. L’endroit où le corps peut, dans un cadre spatio-temporel éphémère, de nouveau pleinement appartenir à soi-même.4

Courte fantaisie sur le rétablissement de la propriété du corps n’est pas une danse spectaculaire mais, au contraire, une danse fragile et non-offensive. Les gestes hésitants, sans accents toniques forts, la plupart du temps dans un flux lié, dont l’intention n’est pas toujours facile à déterminer, sont orientés en dedans. Dans la mémoire du spectateur, ils laissent l’image d’une quête subtile du moindre geste libéré de toute oppression corporelle. Un travail acharné à l’interprétation tâtonnante posant les questions suivantes : A qui appartient le corps de Marjana Krajač?
A nous, spectateurs, le temps du spectacle ou bien aux autorités locales lorsqu’elle s’associe à la manifestation de protestation? Ou encore appartient-il à d’autres? Sans donner de réponses définitives avec ce solo non narratif mais juxtaposé à une photographie qui, elle, raconte clairement un récit d’oppression sociale, Marjana Krajač réveille chez le spectateur une troublante envie de réfléchir sur l’existence de ses propres gestes, de continuer de facon individuelle ce petit fantasme corporel qui consisterait à se mouvoir d’une manière entièrement fidèle à soi-même  une envie de "manifester" en dansant ou en produisant du mouvement d’une quelconque qualité afin d’obtenir le droit de se réapproprier son visage, son cou, ses épaules, ses omoplates, ses bras, ses mains, ses genoux, ses orteils, sa peau…, en somme tout ce qui relève de ce que l’on nomme communément le corps.

À qui appartiennent les espaces de répétition et les lieux de représentation?

Si la pièce Courte fantaisie sur le rétablissement de la propriété du corps se concentre sur la question de l’appropriation corporelle, la suivante, intitulée Mode d’emploi pour les espaces vides5, tisse des réseaux complexes d’interrogations sur les différences et les similitudes entre les gestes créateurs et esthétiques, d’une part, et les gestes quotidiens et banals, de l’autre, sur l’incursion du réel dans le matériau chorégraphique et sur l’observation mutuelle des danseurs pendant les répétitions mettant en relief le processus du travail.
Dans ce spectacle, d’une durée de cinquante minutes, Marjana Krajač, la chorégraphe, et Marko Kostanić, le dramaturge, explorent la relation entre une danse, plus ou moins structurée, exécutée sur scène comme le résultat des différentes procédures et stratégies mises en place au cours des nombreuses répétitions, et une danse en train de s’inventer en studio, telle une série d’essais performatifs sans fin. En effet, l’espace scénique se compose d’un grand écran de projection suspendu au centre de la scène, tandis que, côté jardin, un bout de tapis de danse forme une piste blanche longeant le bord de scène. Pendant toute la durée du spectacle, on peut voir à l’écran un montage vidéo du processus de travail des quatre interprètes Lysandre Coutu-Sauvé, Jacob Peter Kovner, Chloé Serres et Anna Rocha, accompagnés du dramaturge Marko Kostanić. On apercoit le groupe, à différents moments du processus, en train de chercher à s’approprier corporellement l’espace qui les entoure : un grand studio de répétition. Parallèlement aux événements projetés sur l’écran, sur scène, une seule danseuse se meut sur la piste blanche. Il s’agit d’une des trois danseuses filmées par la caméra : Lysandre Coutu-Sauvé.

Le spectateur se trouve dans une situation ambivalente. Il est partagé entre regarder les séquences documentaires filmées durant le processus de travail et regarder la danse exécutée en direct, sur scène. Ainsi la chorégraphe souligne un aspect essentiel de la perception, celui lié à la nécessité de décider et de sélectionner, dans le champ des informations données à voir, celles qui paraissent pertinentes par rapport à l’action envisagée. Les stratégies dramaturgiques et chorégraphiques poussent le spectateur à choisir entre deux formes rivales et l’installent dans une sorte de conflit sensoriel. Du point de vue du public, on voit un double espace performatif : d’une part, l’espace de la scène du théâtre, avec ses parois noires et une lumière artificielle, où l’action se déroule en temps réel, in vivo, et d’autre part, l’espace de la vidéo projetée sur l’écran, avec ses grandes fenêtres faisant entrer l’éclairage naturel. Deux choses sont donc données à voir en parallèle : le processus de création des quatre danseurs filmés avec une caméra low budget et la danseuse sur scène exécutant des gestes peu en lien avec ce qui se déroule sur l’écran. Au début du spectacle, on a une forte impression que le matériel enregistré est un document de travail et qu’il s’agit d’une faction contrairement à l’effet de fiction produit par la danse exécutée par Lysandre Coutu- Sauvé. Au fur et à mesure du déroulement du spectacle nous comprenons que la vidéo est créée à partir d’une sélection de morceaux enregistrés pendant un long processus de création et qu’il s’agit d’un témoignage de répétitions consciencieusement monté.
Le fait que la danse sur scène implique l’improvisation déstabilise une fois de plus le spectateur. En effet, on sent que Lysandre Coutu-Sauvé tisse sa danse à partir d’un imaginaire relevant d’une fine écoute de tous les éléments perceptibles qui l’entourent. A cela, elle intègre une partie du processus de travail capté par la vidéo (parce qu’elle y a contribué), sans pour autant créer un lien direct entre ses gestes et ce qui est projeté et sans se baser sur une partition préalablement écrite. Lysandre Coutu-Sauvé construit donc sa danse en s’appuyant essentiellement sur sa sensibilité proprioceptive et une mémoire "lente" et " charnelle "de l’espace inscrite dans son corps au fur et à mesure des répétitions ainsi que sur son expérience corporelle instantanée de l’espace de représentation dans lequel elle se trouve.
Entre la mémoire documentée par la vidéo et l’instantanéité de la danse exécutée sur scène se joue encore un moment d’instabilité perceptive : on voit qu’il s’agit bien, sur l’écran comme sur scène, de Lysandre Coutu-Sauvé, cependant son dédoublement est quelque peu gênant car, si l’on peut dire, elle n’est pas la même. Elle a changé. Sur la vidéo la danseuse a de longs cheveux abondants, nonchalamment noués au sommet de sa tête. Ils tremblent dès qu’elle bouge, ce qui confère à ses mouvements un côté dispersé et ex-centré. Habillée d’une veste à capuche, elle parle assez fréquemment devant ses collègues pour partager ses impressions et ses réflexions sur le travail en cours. Sur scène, elle ne prononce pas un mot, elle est vêtue d’un tee-shirt et d’un pantalon simple et ses cheveux sont coupés très courts, ces deux derniers éléments soulignant la qualité concentrique du mouvement d’un corps compact. Les différences presque contradictoires entre ces deux allures rendent la danseuse difficilement reconnaissable, mais son visage expressif assure qu’il s’agit bien d’une seule et même danseuse transformée sous l’effet du passage du temps. En nous confrontant à ce travail (soit dévastateur, soit enrichissant) du temps, les auteurs dirigent notre attention sur ce qui se meut entre la réalité du temps passé et celle du moment présent, c’est-à-dire sur le geste dansé, sauvé de la disparition par la captation et réapparaissant plus tard, non pas sous la même forme ni dans le même espace mais créé par la même danseuse.
Sur la vidéo, on percoit des morceaux de danses improvisées par les quatre performeurs, des fragments de leurs énoncés verbaux en relation avec le matériau corporel généré pendant les répétitions, des moments où ils écrivent dans leurs carnets leurs objections personnelles par rapport au processus de recherche de ce "mode d’emploi pour les espaces vides" (par ailleurs, publiées dans le livret accompagnant le spectacle, et qui éclairent le processus de travail mais aussi les approches individuelles, sensorielles et intellectuelles, de chaque danseur vis-à-vis de la création), l’observation attentive du dramaturge, le combat d’une danseuse contre son évidente indisponibilité physique causée par un gros rhume…
Tout cela révèle, d’un côté, le fait que l’on visionne un documentaire témoignant du processus de travail sur une pièce chorégraphique, et de l’autre, nous permet de bien distinguer les interprètes par leurs facons de danser, de parler, d’écrire, par leurs comportements privés, leurs styles vestimentaires, etc., et par conséquent, de les considérer en tant que "personnages de fiction".
Dans ses oeuvres chorégraphiques, Marjana Krajač joue toujours sur les ambiguïtés et les dédoublements. Dans le Mode d’emploi pour les espaces vides cette stratégie chorégraphique implique aussi le rôle du regard : sur la vidéo, on voit à plusieurs reprises les danseurs observer un(e) de leurs collègues en train d’improviser. Pendant ce temps, le spectateur observe ces danseurs en train d’observer tout en étant conscient de la présence de Lysandre Coutu-Sauvé dansant sur scène. Un réseau de regards se tisse et intensifie les relations corporelles entre les interprètes et le dramaturge filmés, la danseuse dédoublée visible sur la vidéo et sur scène, et le spectateur. Celle que nous ne voyons pas, celle qui manque sur la vidéo, est la chorégraphe. Il est donc probable que Marjana Krajač soit derrière la caméra. Elle est " invisible ", mais son corps est investi dans les mouvements de la caméra. Le dramaturge Marko Kostanić, l’observateur très engagé des répétitions du spectacle, est à la fois l’auteur d’un texte intitulé "Le travail, les institutions et les mécanismes décisionnels", publié dans le livret du spectacle Mode d’emploi pour les espaces vides. Il n’y est pas fait mention de la danse ni de la dramaturgie du spectacle, mais plutôt de la dégradation des travailleurs, de la manière dont le travail a été retiré de la sphère politique depuis les trois dernières décennies qui ont précédé la crise économique actuelle, ainsi que de la nécessité de transformer les institutions publiques (en particulier celles de la culture), au lieu de les frapper d’anathème. Kostanić écrit : "Dans le champ culturel nous ne pouvons pas accepter l’assimilation de l’antagonisme esthétique à l’antagonisme politique, parce que l’acte même de lutte pour les institutions publiques apporte des solutions dans la dimension esthétique.6 " Selon Kostanić et Krajač, les espaces des institutions publiques nous appartiennent parce que nous y investissons, d’une manière ou d’une autre, notre travail et notre imaginaire. En d’autres termes, sans nous, ces espaces n’existent pas.
Vers la fin de la vidéo filmant le processus de travail des quatre danseurs et du dramaturge dans le studio de danse, la caméra se déplace en direction de la fenêtre, et enregistre la facade du bâtiment d’en face. Parallèlement au mouvement de caméra vers l’extérieur, sur scène, la danseuse quitte pour la première fois la piste blanche et se déplace en roulant sur le sol pour s’arrêter au milieu de la scène devant l’écran. Elle s’allonge dans une pose propice au songe. S’installe alors une porosité entre l’espace intérieur et l’espace extérieur. La caméra enregistre la vitrine d’un salon de coiffure avec une inscription en turc et la vitrine d’une agence de pari sportif, avec une porte en bois entre les deux. Sur le trottoir devant cette porte, on voit un groupe de trois jeunes hommes, qui sera rejoint un peu plus tard par un quatrième homme, vêtu d’une veste à capuche. Non seulement sa veste ressemble à celle de la danseuse Lysandre Coutu-Sauvé, mais les gestes de ces quatre inconnus ressemblent étrangement aux gestes issus des répétitions que nous avons déjà vues sur la vidéo. Le code secret des gestes banals du quartet masculin dans la rue n’est pas moins opaque pour nous que le comportement des quatre danseurs lors des répétitions visionnées. A un moment donné, les hommes descendent la rue et disparaissent du champ de la caméra. Et puis, un des hommes revient et frappe du pied la porte en bois. Il ne réussit pas à l’ouvrir mais il semble qu’il n’a pas vraiment l’intention de le faire. Pour ouvrir la porte d’un coup de pied, il faudrait que ce geste soit beaucoup plus agressif. Mais en tout cas, ce geste est tout à fait significatif : il marque une forme de rébellion et d’inadaptation. Peu après ce geste impulsif et nerveux, tout à fait unique comparé à la qualité du mouvement présent tout au long du spectacle, la danseuse se lève et se dirige côté cour. Arrivée au bord de scène, elle touche doucement avec la main la paroi devant laquelle elle vient de s’arrêter. Puis elle fait quelques pas en avant pour s’arrêter face au public. Elle le regarde fixement, tranquillement. Une lumière blanche bleutée éclaire l’écran de projection et la scène. Puis tout plonge lentement dans le noir. C’est la fin touchante d’une pièce qui soulève la question d’espace : l’espace de travail, l’espace de création, l’espace de représentation pour la danse, l’espace de représentation dans la vie de tous les jours, et qui réussit à nous mettre face au dilemme entre le besoin existentiel d’un espace réel et matériel et le désir d’un espace métaphorique, poétique, esthétique.
L’activité spectatrice ne cesse pas avec la sortie du public hors de la salle du théâtre : les problèmes posés par les spectacles de Marjana Krajač résonnent dans la corporéité du spectateur, à travers un questionnement sur son propre corps et sur l’espace qui l’entoure, en s’articulant à d’autres questions pesantes du quotidien, exacerbées par la crise actuelle. Mode d’emploi pour les espaces vides et Courte fantaisie sur le rétablissement de la propriété du corps disent/dansent que face à toutes les tentatives de monopolisation des biens publics et des corps, et en dépit de tous les conflits entre les possesseurs d’espaces et les artistes qui y investissent leurs imaginaires, le champ spatio-corporel se doit d’être reconquis. Chaque jour, à nouveau.



1 Cité du livret qui accompagne le spectacle Courte fantaisie sur le rétablissement de la propriété du
corps disponible en PDF sur le site www.sodaberg.hr. Ce site, en croate et en anglais, est consacré à l’œuvre de Marjana Krajač et à son organisation artistique intitulée Sodaberg.

2Cet article se réfère à la représentation de la Courte fantaisie sur le rétablissement de la pro- priété du corps (Kratka fantazija o ponovnom uspostavljanju vlasništva nad tijelom) qui a eu lieu le 12 juin 2012, dans le cadre de la Plateforme de la danse croate au Centre de la danse de Zagreb. Conception, chorégraphie, interprétation : Marjana Krajač. Dramaturgie : Marko Kostanić. Lumières : Bojan Gagić. Graphisme : Valentina Toth. Photographie : Gordana Obradović-Dragišić. Réalisation, production, partenaires : L’Institut croate de mouvement et de danse, Centre de la danse de Zagreb, le festival Semaine de la danse contemporaine de Zagreb, Teatro Viriato Viseu Portugal, RE.AL Lisbon, dans le cadre du programme W-Est_Where, le Ministère de la Culture de la République de Croatie, Office de la Culture de la Ville de Zagreb, Sodaberg, Tanzfabrik Berlin.

3 Laurence Louppe, Poétique de la danse contemporaine, Contredanse, 2004, p. 56.

4 Voir la note 1.

5 Cet article se réfère à la représentation de Mode d’emploi pour les espaces vides (Priručnik za prazne prostore) qui a eu lieu les 26 et 27 janvier 2012 au Centre de la danse de Zagreb. Concept et chorégraphie : Marjana Krajač. Dramaturge : Marko Kostanić. Interprètes : Lysandre Coutu-Sauvé, Jacob Peter Kovner,Chloé Serres, Ana Rocha. Lumières, bande sonore et vidéo : Bojan Gagić. Graphisme : Valentina Toth. Réalisation, production, partenaires : Sodaberg, Uferstudios / Tanzfabrik Berlin, Centre de la danse de Zagreb, L’Institut croate de mouvement et de danse, Office de la Culture de la Ville de Zagreb, Ministère de la Culture da la République de Croatie, Choreoroam 2011 Project by CSC Bassano del Grappa / Opera Estate Festival, The Place London, Rotterdam Dansateliers, a-2/Certamen Choreography Paso de Madrid.

6 Cité du livret qui accompagne le spectacle Mode d’emploi pour les espaces vides disponible en PDF sur le site www.sodaberg.hr.

Published: 17/08/12

About two choreographic works of Marjana Krajač: MANUAL FOR EMPTY SPACES and SHORT FANTASY ABOUT RECLAIMING THE OWNERSHIP OVER MY OWN BODY, published in 2012 in Journal for Dance Art Kretanja. Written by: Katja Šimunić (editor and dance theoretician)

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